jeudi 20 mars 2025

4 - Les Habitants

 

 

Admirez les harmonies des couleurs de la tenue de Khalid : ghutra (keffieh), chemise et fouta traditionnelle (long pagne) dont les yéménites ne se départissent pas. 



La fouta est un large tissu rectangulaire strié de couleurs, qui couvre les jambes. Roulée à la taille en ménageant un petit pan triangulaire flottant, elle peut être relevée de moitié, mais il vaut mieux alors porter un caleçon, ce qui n'est pas toujours le cas.






 



 
 


 Sur le keffieh aussi, il est de bon ton de laisser flotter un petit pan triangulaire.

 

La population d'origine yéménite, mais aussi somalienne et indienne, compte environ 45.000 sujets, dont un tiers vit dans les villes de la côte nord. Hâdibo, sur la côte nord, siège du gouvernorat, est la ville la plus peuplée avec 9000 habitants. 

La diaspora, qui représente un autre tiers de la population, comprend des communautés de pêcheurs sur la côte de l'Hadramaout, et des fonctionnaires de police dans l'émirat d'Adjmân, le plus petit des Émirats arabes unis.

 

 

La religion est l'islam sunnite, encore mâtiné de christianisme dans la pratique religieuse jusqu'à la fin du XXème siècle.

 

 

Nous avons commencé notre trek à travers les Monts Haghier la veille du ramadan, depuis le village d'Abdulrahman, qui allait nous accompagner pendant une semaine jusqu'à la plaine littorale sud, lui respectant scrupuleusement le jeûne, dans des conditions physiques et thermiques très peu favorables, c'est le moins qu'on puisse dire...

قات

Sur Soqotra, le qat (qât) est consommé comme au Yémen continentale, mais nous ne savons pas si Abdulrahman s'y adonne car, pas plus que l'eau, ce n'est autorisé pendant le ramadan.

 

 

Le goût du qat a rebuté d'emblée Céline et Jean-Baptiste. Ma propre expérience à Hodeïda (Yémen continental) avait été piteuse, j'avais avalé par inadvertance la chique que j'aurais dû mâchouiller pendant des heures, et été la risée des Yéménites. Mais ce n'était pas pendant le ramadan.

 

 

Une mosquée sur la côte nord. L'appareillage des pierres sur les mosquées comme sur les maisons, même modestes, est toujours très soigné. 

 


Une mosquée toute simple dans l'intérieur des terres. De tout petits hameaux, à peine trois ou quatre maisons, possèdent leurs mosquées.





 La grande mosquée de Hâdibo.


 

Dans la montagne, les maisons sont en pierre nue, avec peu de mortier.


 

 

Nos sacs dans une maison. Voyez la charpente.

Nous étions volontiers invités à entrer dans les maisons, en dehors de la présence des femmes qu'il ne fallait pas photographier. 

 


Quand la pièce est grande, la charpente est soutenue par un pilier central massif.


 

 

LA LANGUE


La langue, le soqotri, rattachée à un état très ancien du sémitique apparenté à la langue de la reine de Saba, constitue un rameau des langues sud-arabiques, qui diffèrent radicalement de l'arabe par la phonétique, le vocabulaire et la syntaxe, sans compréhension mutuelle. Les principales langues sud-arabiques étaient parlées dans les quatre grands royaumes caravaniers du sud-ouest de la péninsule arabique, les royaumes de Saba, de Ma'în, de Qatabân et d'Hadramaout.

 


N'oublions pas qu'en visite chez Salomon, la reine de Saba en fut si impressionnée qu'elle en eut "le souffle coupé".

A présent, le soqotri est une langue en péril, sans statut officiel, langue d'une minorité, non écrite, non enseignée, non véhiculaire, mais utilisée dans la vie quotidienne avec le mérite de transmettre les traditions propres à Soqotra, les contes et la littérature orale dans des joutes poétiques. Ces joutes, prisées des jeunes générations peuvent se dérouler par téléphonie mobile.

Dans le centre de l'île, existent des dialectes conservateurs réputés incompréhensibles pour les gens de Hâdibo.

La langue véhiculaire est l'arabe du fait de son statut prestigieux, langue de la religion, langue officielle, langue scolaire, langue des médias et langue du commerce. 

 

Le nom de l'île écrit en arabe comporte la lettre qâf, un « coup de glotte » inconnu dans l'alphabet latin. Par convention, elle doit se transcrire par le « q sans u » : Soqotra. Mais, en pratique, il m'a semblé que les Soqotris prononcent ce son comme un "K", et la transcription du nom de l'île serait alors Socotra...



 

 LES ACTIVITÉS PROFESSIONNELLES

 


1 - La pêche, au filet ou avec des nasses, alimente des navires usines émiratis, indiens ou chinois. La pêche des requins rapporte gros par l'exportation des ailerons vers la Chine, au point de menacer l'espèce d'extinction. 7000 tonnes annuelles de requins pouvaient être pêchées au XXème siècle.

Pour la consommation locale, les poissons, sardines et anchois, sont séchés et salés.

Autrefois, la pêche des tortues, pour en exporter les carapaces prisées pour leur écaille, utilisait un rémora qui se fixait sur la tortue comme il le fait sur le requin : le rémora est ligoté au bout d'un filin et son adhésion à la carapace est telle qu'elle permet de remonter la proie. Entre deux pêches, le rémora était gardé vivant dans une outre d'eau de mer. 

 


 

 

 

Nous avons dégusté avec plaisir l'une de ces quatre bonites cuisinée par Khalid.


Crédit CC-JB

2 - L'élevage

A l'intérieur de l'île, les bédouins (pasteurs nomades arabes vivant de l'élevage d'ovins, caprins, camélidés) entourent le bétail de soins attentifs, usant d'onomatopées (que nous avons tenté en vain d'imiter) pour appeler leurs bêtes et de chants pour favoriser la lactation.

 


 

 


Le taureau porte... un tablier contraceptif...

 

La population caprine, la plus nombreuse parmi les espèces domestiques, est évaluée à 480.000 têtes. Des entailles précises et codifiées dans les oreilles des chèvres permettent de définir leur propriétaire. 

 



Boire le lait de chèvre tiède ! 
Ai-je un air sceptique ?
 


 

                                                                 

Crédit CC-JB
Nous avons accompagné la transhumance de quelques chèvres dont les chevreaux venaient de naître, jusqu'à la plaine littorale de Nogued. Celui que tient Céline est né dans la journée, encore enduit de la salive de sa mère.





Descendre du plateau par ce qui nous semblait être une falaise nous a pris beaucoup plus de temps qu'aux bergers, qui couraient comme leurs chèvres, parfois pieds nus dans la caillasse !



3 - Le maraîchage

Les "jardins" permettent de cultiver bananiers, goyaviers, manguiers, papayer, avocatiers, et citronniers verts, ces derniers souvent présents dans les cours des maisons. Les palmeraies, les cultures maraîchères, le sorgho nourrissent la population. 

 


 
 


 

                                
                                                    Crédit CC-JB

Le palmier dattier est l'une des 2000 espèces de palmiers.


Il a un atout pour le randonneur : les palmeraies permettent de préparer un voyage ! Vues du ciel elles définissent le choix d'un itinéraire par les haltes qu'elles promettent.

 


En effet, le palmier vit "les pieds dans l'eau et la tête au soleil", signalant une oasis où se regroupent des maisons, et surtout témoignant d'une source dans le désert où s'abreuve le mammifère assoiffé.

 




Cueillir les dattes


 

Le suc d'aloès, l'encens, la résine sang-dragon, le miel sont prisés à l'exportation.

 


Le miel de Socotra est très vanté pour son parfum plus ou moins fumé, à la fois sucré et légèrement amer. C'est l'un des miels les plus rares, les plus appréciés et les plus chers au monde
Sa production traditionnelle repose sur la récolte de nids sauvages, et illustre le lien étroit entre les habitants et leur environnement. Associé à la flore unique de Socotra, le profil de ce miel est totalement différent de celui des miels produits en Afrique et en Asie.
Ancestralement, il est employé contre les troubles gastriques, la toux, le diabète et les brûlures cutanées.

 

4 - L'artisanat comprend le tissage de couvertures en poil de chèvre, et la poterie décorée par la résine rouge du dragonnier.

Le commerce est fructueux avec les Émirats, l'Inde, la côte africaine.

Les habitants ont longtemps vécu plus ou moins coupés du monde extérieur, favorisant l'harmonie avec la nature.

Les premières routes datent de 2008, l'aéroport de 1999, le port moderne de 2015.

 

L'AVENIR








 

 

1 commentaire:

  1. Et toi, t'y arrives à faire le coup de glotte ?
    Très belles photos !

    RépondreSupprimer